6 juillet 2008

Contre l'entreprise de démantèlement social du gouvernement, le Conseil Général du Nord est un rempart pour les plus fragiles.

SEANCE PLENIERE DU 30 JUIN 2008

INTERVENTION DE DIDIER MANIER

Monsieur le Président, Mes Chers Collègues,

L’examen du compte administratif de notre Département est à première vue une formalité. Mais dans les faits, il est notre vrai bilan politique.

D’une part, parce qu’il clôt définitivement une année budgétaire, l’année 2007. D’autre part, parce qu’il met chacun devant ses responsabilités. Ce contrôle du compte administratif sonne comme un instant de vérité. Notre collectivité a su gérer avec sérieux et efficacité les finances départementales. Notre budget a respecté les deux principes fondamentaux que sont l’équilibre et la sincérité budgétaires.

Le mérite en revient à notre collègue, Bernard Haesebroeck. Et j’en profite pour féliciter également les services : Monsieur Michel Lavenseau, notre Directeur Général et Monsieur Gérard Courbet, notre Directeur Général Adjoint chargé des finances. Alors que le déficit public s’aggrave de manière inquiétante au sommet de l’Etat, il est bon de rappeler que le Conseil Général du Nord utilise quant à lui les deniers de nos concitoyens avec parcimonie, en veillant à l’utilité de chaque euro dépensé. Un indicateur de cette bonne gestion est le taux de réalisation.

Au titre de l’exercice 2007, il s’élève à 95,1% pour les dépenses de fonctionnement et à 74,3% pour les dépenses d’investissement. Ces taux de réalisation sont particulièrement satisfaisants. Ils montrent que nous mobilisons efficacement nos ressources dans l’intérêt du Nord et des Nordistes.

C’est grâce à cette gestion réaliste que nous avons pu préserver nos politiques volontaristes. Je ne vais pas en faire le tour… mais certaines d’entre elles méritent tout particulièrement notre attention. Notamment parce qu’elles touchent au quotidien de nos concitoyens. Et nous savons que leur quotidien est de plus en plus difficile : baisse du pouvoir d’achat, franchises médicales, remise en cause des 35h, chasse aux chômeurs… indéniablement, cette année 2008 a été marquée par des reculs sociaux inacceptables.

Malheureusement, la situation du pays n’est pas prête de s’améliorer. La nouvelle Loi de Modernisation Economique, sous couvert de faire baisser les prix, va accroître le poids des grandes surfaces et des banques. C’est encore la loi du plus fort qui va triompher. Nous savons pertinemment que les conditions de référencement pour les fournisseurs sont parfois tellement drastiques que les petites entreprises sont complètement lésées. Parfois même, elles sont contraintes de licencier pour s’ajuster sur les exigences des centrales d’achat. Et au bout du compte les prix à l’affiche ne cessent d’augmenter. Cette loi ne prend aucune garantie pour que l’autorité de la concurrence dispose de moyens suffisants pour mettre en cause les monopoles locaux. Bien au contraire, elles laissent présumer un renoncement à l’action de groupe chère aux associations de consommateurs. Le président Sarkozy avait promis de s’atteler à la question du pouvoir d’achat mais en réalité il construit une nouvelle machine à inégalités où la grande distribution, les centrales d’achat et les banques se taillent la part du lion sur le dos des autres.

Contre la casse sociale du gouvernement, le Conseil Général du Nord est un rempart pour les plus fragiles. Parce qu’aujourd’hui, nul n’est à l’abri du chômage, de la précarité et de la misère ; au Département, nous avons voulu donner ou redonner une chance à chacun.

Redonner une chance à chacun avec notre politique d’insertion pour laquelle nous avons dépensé près de 433 millions d’euros. Cette politique, il faut nous en féliciter. Et nous ne sommes pas prêts à la remettre en cause, bien au contraire. Le nombre d’allocataires titulaires d’un contrat d’insertion progresse constamment : plus de 54% d’entre eux en bénéficient aujourd’hui. Nous avons augmenté nos efforts dans le domaine des contrats d’avenir en dépensant plus de 21 millions d’euros en 2007 contre 18 millions d’euros en 2006.

Il m’a semblé important de citer ces quelques chiffres. Ils montrent que notre action départementale refuse de s’aligner sur les régressions sociales du gouvernement. Il en va de même pour l'éducation. Les injustices de la vie ne concernent pas seulement les adultes. Elles touchent les enfants dès leur plus jeune âge. Personne ne peut rester indifférent à cela. La majorité départementale en est bien consciente. C’est pourquoi elle a fait de l’éducation l’une de ses priorités.

Pour préparer l’avenir de nos enfants, nous avons investi plus de 163 millions d’euros. Ainsi, les collégiens de Thiant, de Solesmes, de Mons-en-Baroeul, de Roubaix pourront accomplir leur scolarité dans de nouveaux bâtiments. Nous avons également équipé l’ensemble des collèges de classes pupitres qui permettront à tous les élèves de maîtriser l’outil informatique. L’ambition pour le Nord et les Nordistes, n’en déplaise à nos collègues de la Droite, c’est nous qui l’avons portée ! Comme nous avons porté les aides à la demi-pension et les aides aux collégiens en difficulté scolaire.

Nous avons bien fait car les élections des 9 et 16 mars résonnent comme un gage de satisfaction des habitants de notre Département. Je le dis. Le travail accompli par la majorité de gauche a été salué par nos concitoyens. Ce résultat n’est pas tombé tout seul. Nous avons dû déployer beaucoup d’énergies
pour l'aménagement des territoires et les 32 millions d'euros que nous lui avons consacré, pour le développement économique (11 millions d'euros) ou encore pour moderniser la voirie qui nous a été transférée (153 millions d’euros en 2007 dans le cadre du Plan Routier Spécial « routes nationales transférées » contre 96 millions d’euros en 2006).

Les électeurs ont sans doute reconnu notre volontarisme mais aussi la responsabilité avec laquelle nous avons géré le Département. Cette responsabilité ; nous la retrouvons dans la Décision Modificative N°1 qui garantit la stabilité de notre budget. Ce qui saute aux yeux, c’est la fragilité de notre équilibre budgétaire à l’issue de la Décision Modificative N°1 qui dégage un excédent de 9 millions d’euros que nous avons affecté, comme chaque année, à l’environnement et aux Espaces Naturels sensibles.

Malgré la crise des finances publiques, la majorité départementale a souhaité inscrire des crédits supplémentaires pour des actions significatives. Des actions qui améliorent la qualité de vie des Nordistes.

C’est le cas des 3 millions d’euros que nous avons accordés pour la Maison Départementale des Personnes Handicapées de Valenciennes ou des 2,5 millions d’euros affectés aux réparations urgentes dans les collèges. Enfin, pour faire face au désengagement de l’Etat vis-à-vis des Caisses Régionales d’Assurance Maladie (CRAM), nous avons dû injecter 2 millions d’euros supplémentaires dans le cadre du versement de l’Allocation pour les Personnes Agées.

On voit bien que nous faisons du mieux possible pour optimiser nos marges de manœuvre qui se réduisent comme peau de chagrin. Cette Décision Modificative montre en filigrane l’échec de la décentralisation telle qu’elle est déclinée par la Droite. Le manque de compensations financières est en train d'asphyxier les collectivités territoriales.

Ceci est particulièrement vrai dans le Département du Nord. Prenons l’exemple du transfert des TOS et du personnel de la DDE. La taxe sur les conventions d’assurance, sensée compenser la prise en charge des 1500 nouveaux agents, nous a rapporté 50 millions d’euros. C’est nettement insuffisant.

Je pense qu’il est inutile de rappeler que les collectivités territoriales ont hérité des impôts les moins dynamiques, les « 4 vieilles ». Et on le voit bien, les nouveaux impôts transférés ne tiennent pas toutes leurs promesses. Et je ne parle même pas du plafonnement de la taxe professionnelle ou de la diminution des droits de mutation… Autant de manques à gagner pour le Département.

On assiste à un dépérissement de la fiscalité locale. Autrement dit, notre autonomie fiscale se retrouve écornée. Sur ce plan, l’avenir est de plus en plus sombre. Dans le cadre de la Révision Générale des Prélèvements Obligatoires, l’Elysée envisage de s’en prendre à une de nos recettes principales : la taxe professionnelle. Il est prévu d’exonérer les entreprises en fonction de leur investissement. Mais l’Etat ne dit pas comment il compensera le manque à gagner pour les collectivités territoriales. Ce que l’on peut craindre du Président Sarkozy c’est qu’il choisisse la solution de facilité : on l’entend à nouveau remettre en cause les Départements. C’est dire que la démocratie de proximité est en réel danger.

Comment le Conseil Général du Nord va-t-il pouvoir affronter cette situation ? Je crois que nous allons devoir redoubler nos efforts pour préparer l’avenir. La gestion publique départementale doit s’inscrire dans une démarche prospective pluriannuelle comme nous le faisons déjà pour le Service Départemental d’Incendie et de Secours. Il faut être lucide. Nous allons devoir rivaliser d’ingéniosité et d’efforts financiers pour compenser les nombreux désengagements du gouvernement.

Nous allons également devoir nous battre pour obtenir ce qui nous est dû par l’Etat au titre des transferts de compétence. Je vais prendre un exemple éloquent : le financement de l’allocation du RMI. Le Département du Nord verse 385 millions d’euros. L’Etat, par le biais de la TIPP, n’indemnise qu’à hauteur de 310 millions d’euros. Il nous reste un déficit de 75 millions d’euros. Oui. J’ai bien dit de 75 millions d’euros qui sont à la charge du Département en 2007.

Il est clair que dans ces conditions nous ne pourrons plus assumer très longtemps le financement de l’insertion. L’écart est trop grand entre les dépenses réellement supportées et la compensation que le Département perçoit. D’autant plus que les dotations de l’Etat, qui représentent plus du tiers de nos recettes, évoluent à une vitesse bien inférieure à celle de l’inflation. On voit bien que notre autonomie financière n’est pas respectée ! Aujourd’hui, elle est même dangereusement menacée. S’il est écrit, dans la Constitution de notre République, que les collectivités territoriales s’administrent librement (article 72) ; il n’est pas dit qu’elles doivent assumer les carences de l’Etat ! Surtout lorsque celui-ci consent des réductions d'impôt aux plus favorisés de notre pays ... alors que les collectivités souffrent d'un manque criant de moyens !

Nous devons être revendicatifs vis-à-vis de l’Etat si l’on veut continuer à offrir nos services aux Nordistes qui en ont bien besoin. Il n’est pas nécessaire de rappeler que notre Département assure des missions de service public essentielles. Ces missions ne doivent pas être sacrifiées sur l’autel de la réduction du déficit public, déficit dont notre collectivité n’est pas responsable ! Je vous le demande. Qui financera les collèges, l’Allocation aux Personnes Agées, l’insertion si nous ne le faisons pas ?

Voilà tout le paradoxe de la Droite. Alors qu’elle commande des rapports pour supprimer les départements, elle nous laisse la mise en œuvre d’une mesure phare, le RSA, qui risque de rester purement symbolique en raison du manque de moyens dégagés. Encore une fois, le gouvernement laisse à d’autres le soin de trouver les financements nécessaires pour mettre en œuvre des politiques qui devraient relever de la solidarité nationale.

Comme je le disais au début de mon intervention, l’examen du compte administratif doit mettre chacun face à ses responsabilités. C’est le cas du Département du Nord. Ce doit être le cas de l’Etat. Le Nord et les Nordistes en ont assez d’être considérés comme la cinquième roue du carrosse ! Nous n’accepterons pas de voir nos ambitions freinées par les multiples désengagements du gouvernement.

Malgré ce contexte que j’ai voulu dénoncer, nous pouvons nous montrer satisfaits de la gestion des deniers départementaux. C’est pourquoi, Monsieur le Président, mes Chers Collègues, au nom du Groupe Socialiste, nous approuvons le Projet de Compte Administratif et la Décision Modificative N°1.

Je vous remercie de bien vouloir en prendre acte.