25 mai 2009

Mise en oeuvre du RSA dans le Nord

Séance Plénière du Lundi 18 mai 2009

Intervention de Didier MANIER, Président du groupe socialiste

Mise en œuvre du RSA dans le département du Nord


Monsieur le Président,
Mes Cher (e) s Collègues,

La loi généralisant la mise en œuvre du Revenu de Solidarité Active entre en vigueur le 1 juin prochain.

Le Nord se met en ordre de marche, c’est l’objectif des délibérations que nous sommes tenus d’adopter.

Bien entendu, les élus du groupe socialiste que je représente voteront les délibérations.

Mais je veux dire d’emblée qu’il n’y pas de quoi se réjouir face à l’arrivée de ce dispositif, qui n’a pas fait ses preuves, qui ne s’est prémuni d’aucun dérapage, et dont les financements restent totalement hasardeux.

La loi sur le RSA marque, en outre, le passage sans transition d’un système de solidarité à un système de pseudo mise à l’emploi.

A cet égard, nous avons des craintes sérieuses sur l’efficacité et le devenir d’un tel dispositif.

C’est dire que nous ne faisons pas partie de ceux qui se réjouissent de la mort du RMI.

Parce que tout simplement, ce RSA, ce n’est que le RMI, sans le I. Ce fameux I de l’insertion.

Mais l’insertion a été tellement décriée et combattue par la droite… jusqu’à confondre « assistanat » et « insertion ».

Elle n’a jamais voulu comprendre la différence.

Aussi, aujourd’hui avec la nouvelle loi,

- soit vous êtes apte, et vous devez accepter n’importe quel emploi, à n’importe quelle condition.

- soit, vous êtes inapte et vous basculez définitivement dans l’assistance, et ce pour combien de temps…

Voilà, non pas comment nous voyons les choses, mais comment elles risquent de se passer. Il ne faut pas se voiler la face.

Bien entendu, nous le dénonçons !

C’est la logique de l’exclusion portée à son paroxysme. Quel espoir, quel projet de vie, pour ceux qui n’auront a priori pas accès au pôle emploi ?

Les Départements conservent pleinement la compétence sociale. Nous nous occuperons donc de ces publics exclus avec toute la solidarité qui nous caractérise.

Ce sera tout l’enjeu de notre prochain Plan Départemental d’Insertion. La lutte contre l’exclusion en sera un élément fondamental.

L’idée d’un Revenu de Solidarité Active valait la peine qu’on s’y arrête. Le Nord a d’ailleurs fait partie des départements candidats pour expérimenter le dispositif.

Malheureusement, il y a des effets indésirables, voire des effets toxiques.

Il faut savoir que les mois d’expérimentation ont déjà démontré que plus de 72% des allocataires n’ont obtenu que des emplois précaires.

A terme, le RSA c’est la porte ouverte aux emplois bas salaire ou à des temps partiels. Rien n’est prévu, aucun garde fou n’est posé pour aboutir à des emplois suffisamment rémunérateurs avec des garanties.

Il faut s’en inquiéter ! Cette situation compromet gravement la pérennité du dispositif, d’autant que le financement est loin d’être bouclé.

Ce n’est pas un point de détail.

L’Etat laisse déjà une ardoise de deux milliards d’euros aux Départements pour le RMI. Comment compte-t-il financer le RSA ?

Nous savons qu’avec la crise, le nombre d’allocataires du RSA va grimper en flèche, nous savons qu’il n’y aura pas d’emplois pour tous, nous savons que nous n’aurons pas l’argent pour payer tout le monde.

La RSA est donc à nos yeux un leurre.

Il le restera tant qu’il ne sera pas acté dans les faits, qu’il s’agit d’un dispositif qui doit relever de la solidarité nationale, avec des financements nationaux, établis dans le cadre d’une vraie réforme des finances locales.

Ce sera un leurre social et économique, si des gardes fous ne sont pas posés pour éviter de créer durablement des sous emplois, et pour éviter que des personnes acceptent des salaires au rabais, au prétexte qu’ils seront maintenus sous oxygène grâce à la compensation « travailleur pauvre ».

Le RSA risque d’institutionnaliser le nivellement par le bas, de faire le jeu de ceux qui sont plus soucieux de leurs dividendes que des conditions de travail de leurs salariés.

Nous exprimons aussi nos plus vives inquiétudes sur la façon dont les demandeurs d’emplois seront accueillis, accompagnés et traités dans ce système. Car il en faudra des moyens humains, des recrutements de personnels pour gérer efficacement et accompagner les personnes qui basculent du RMI vers le RSA.

Nous savons tous que l’accompagnement, le suivi des situations personnelles est la clef de la réussite de ce dispositif.

Bien sur que nous étions partants pour tout faire pour le retour à l’emploi.

En tant que socialistes, nous avons prôné la logique de la solidarité active, une solidarité qui tire chacun vers le haut, vers l’insertion, vers un vrai projet de vie, avec un logement, un emploi.

Il n’y a pas de double langage, ni d’hypocrisie dans notre discours : le travail vaut mieux que l’assistance, tout faire pour inciter au retour à l’emploi est une nécessité.

Mais avec le RSA tel qu’il est conçu, nous allons peut être vivre l’enfer pavé de bonnes intentions…

Nous assistons donc à la naissance d’un dispositif qui devra nécessairement s’améliorer, s’affiner, s’humaniser, cela dans le contexte d’une crise économique qui impacte fortement l’emploi.

Le RSA n’avait pas achevé son expérimentation.

C’est un grand prématuré, avec une mise en œuvre qui est prévue dans des conditions aléatoires.

Avec nos conventions et délibérations, nous tentons de cadrer les choses dans l’intérêt de nos allocataires, des Nordistes. Mais nous ne pourrons pas tout maîtriser. Loin de là.

Demain, il ne faudra pas en rendre responsables les Départements qui ont les mains liées.

Pour autant, sur le terrain, les Conseillers Généraux que nous sommes devront répondre aux élus locaux, aux partenaires, et aux allocataires impliqués.

Ce sont des jours difficiles qui nous attendent.

Voilà, nos réserves et nos craintes, Monsieur le Président, au moment où nous adoptons une délibération sur la mise en œuvre du RSA.